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Le moine dans le palais du roi

Un conte Zen au sujet de la simplicité et de la possessivité, raconté par Osho
Un roi était très impressionné par la vie simple et innocente d'un moine bouddhiste. Peu à peu, il l'accepta comme son maître. Il observa – c'était un homme très calculateur – et il s'informa de son caractère: "Y a-t-il une faille dans sa vie ?" Lorsqu'il fut totalement convaincu – ses détectives lui expliquèrent que "cet homme n'a aucune contradiction dans sa vie, il est absolument pur, simple. C'est vraiment un grand saint, un bouddha." – alors il alla vers l'homme, toucha ses pieds et dit : "Monsieur, je vous invite à venir vivre dans mon palais. Pourquoi vivre ici ?"
Au fond de lui, bien qu'il invitât le saint, il s'attendait à ce qu'il refuse, qu'il dise : "Non, je suis un homme simple. Comment puis-je vivre dans ce palais ?" Voyez la complexité du mental humain : il l'invitait, il s'attendait à une grande joie s'il acceptait l'invitation, et pourtant, il avait une pensée sous-jacente : le saint, s'il était vraiment un saint, il refusera, il dira : "Non, je suis un homme simple, je vis sous un arbre – telle est ma vie simple. J'ai quitté le monde entier, j'ai renoncé au monde, je ne peux y revenir."
Mais le saint était vraiment un saint – il devait être un bouddha. Il dit : "Bon. Où est le véhicule ? Apportez votre char et j'irai au palais." Il répondit : "Bien sûr, quand on vient au palais, il faut venir avec élégance. Apportez le char !"
Le roi fut très choqué : "Cet homme semble être un tricheur, un imposteur. On dirait qu'il a feint toute cette simplicité juste pour m'attirer." Mais il était trop tard ; il l'avait invité et il ne pouvait pas revenir sur sa parole. Homme de parole – un samouraï, un guerrier, un grand roi – il dit : "Bon, maintenant je suis pris. Cet homme ne vaut rien – il n'a même pas refusé une seule fois. Il aurait dû refuser !"
Il amena le char, mais il n'était plus heureux, il n'était plus joyeux. Mais le saint était très heureux ! Il était assis dans le char comme un roi, et le roi était assis dans le char, très triste, l'air un peu bête. Et les gens observaient dans les rues : "Que se passe-t-il ? Le fakir nu… !" Il était assis comme un empereur, et le roi paraissait bien pauvre comparé à cet homme. Et il était si joyeux, si joyeux ! Et plus il était extatique, plus le roi était triste : "Maintenant, comment se débarrasser de cet homme ? Je me suis laissé prendre dans ses filets, tout seul. Tous ces détectives et ces espions sont des imbéciles – ils n’ont pas pu voir que cet homme avait un plan." Comme s’il était resté assis sous cet arbre pendant des années pour impressionner le roi ! Toutes ces idées lui traversèrent la tête.
Le roi avait réservé la meilleure chambre pour le saint, s'il acceptait de venir. Mais il ne croyait pas qu'il viendrait un jour.
[…] Le saint arriva dans la chambre – il était assis sous l'arbre depuis des années – et dit : "Apporte ceci, apporte cela. Si je dois vivre au palais, je dois vivre comme un roi !"
Le roi était de plus en plus perplexe. Bien sûr, il l'avait invité, et tout ce qu'il demanda lui fut apporté. Mais le cœur du roi était lourd, il devenait de plus en plus lourd chaque jour, car le saint commençait à vivre comme un roi – et même mieux que lui, car le roi avait ses propres soucis et le saint n'en avait aucun. Il dormait jour et nuit. Il profitait du jardin et de la piscine, et il se reposait sans cesse. Et le roi pensa : "Cet homme est un parasite !"
Un jour, ce fut insupportable. Il devait parler au saint… Le saint était allé se promener dans le jardin, et le roi arriva aussi et dit : "Je veux te dire quelque chose."
Le saint dit : "Oui, je sais. Tu voulais le dire avant même que je quitte mon arbre. Tu voulais le dire quand j'ai accepté ton invitation. Pourquoi as-tu attendu si longtemps ? Tu souffres inutilement. Je vois que tu es triste. Tu ne viens plus me voir. Tu ne me poses plus les grandes questions métaphysiques et religieuses que tu me posais quand je vivais sous l'arbre. Je sais, mais pourquoi as-tu perdu six mois ? Je ne comprends pas. Tu aurais dû me le demander immédiatement, et tout aurait été réglé sur-le-champ. Je sais ce que tu veux demander, alors dis-moi !" Le roi dit : "Je ne veux te demander qu'une seule chose. Quelle est la différence entre toi et moi ? Tu vis plus luxueusement que moi ! Et moi, je dois travailler, m'inquiéter et assumer toutes sortes de responsabilités, tandis que toi, tu n'as ni travail, ni souci, ni responsabilité. Je suis jaloux de toi ! Et j'ai définitivement cessé de venir te voir, car je ne pense pas qu'il y ait de différence entre toi et moi. Je vis dans la richesse, mais toi, tu en as plus que moi. Chaque jour, tu me demandes : "Apportez le char d'or ! Je veux aller me promener à la campagne. Apportez ceci, apportez cela !" Et tu manges de la nourriture délicieuse. Et maintenant, tu n'es plus nu, tu portes les plus beaux vêtements possibles. Alors, quelle est la différence entre toi et moi ?"
Le saint rit et dit : "La question est telle que je ne peux y répondre que si tu viens avec moi. Sortons de la ville."
Le roi le suivit. Ils traversèrent la rivière et continuèrent leur route. Le roi demandait sans cesse : "À quoi bon continuer ? Pourquoi ne pas répondre maintenant ?"
Le saint dit : "Attend un peu. Je cherche le bon endroit pour répondre."
Ils arrivèrent alors à la frontière de son royaume, et le roi dit : "Le moment est venu, voici la frontière."
Le saint dit : "C'est ce que je cherchais. Je ne reviens pas. Viens-tu avec moi ou retournes-tu ?"
Le roi dit : "Comment puis-je venir avec toi ? J'ai mon royaume, mes biens, mes femmes, mes enfants – comment puis-je venir avec toi ?"
Et le saint dit : "Tu vois la différence ? Je m'en vais et je ne me retournerai pas une seule fois. J'étais au palais, je vivais avec toutes sortes de biens, mais je n'étais pas possessif. Tu es possessif. C'est cela la différence. Je m'en vais."
Il se déshabilla, donna la robe au roi et dit : "Garde tes vêtements et retrouve le bonheur."
Le roi réalisa alors sa bêtise : cet homme était rare, une perle rare. Il tomba à ses pieds et dit : "Ne pars pas. Reviens. Je ne t'ai pas encore compris. Aujourd'hui, j'ai vu la différence. Oui, c'est ça la vraie sainteté."
Le saint dit : "Je ne peux pas revenir, car souviens-toi, tu redeviendras triste. Pour moi, il n'y a aucune différence entre aller de ce côté ou de l'autre, mais tu redeviendras triste. Maintenant, laisse-moi te rendre heureux. Je ne viens pas, je m'en vais." Plus le saint insistait pour partir, plus le roi insistait pour qu'il revienne. Mais le saint dit : "Une fois suffit. J'ai vu que tu es stupide. Je peux revenir, mais dès que je dis “Je peux revenir”, je vois dans tes yeux les vieilles idées revenir : "Peut-être qu'il me trompe encore. Peut-être que ce n'est qu'un geste vide de sens, me donnant les vêtements et disant qu'il part, pour que je sois à nouveau impressionné." Si je reviens, tu seras de nouveau malheureux, et je ne veux pas te rendre malheureux."
Rappelle-toi la différence : la différence ne réside pas dans les possessions, mais dans la possessivité. Une personne simple n'est pas quelqu'un qui ne possède rien, une personne simple est quelqu'un qui n'a aucune possessivité, qui ne regarde jamais en arrière.
Osho, The White Lotus, Chapitre 6, Q1 (extrait)
Traduit de l'anglais par meditationfrance
