meditationfrance, méditation, tantra, connaissance de soi
Les archives de Meditationfrance

La Nature de la Conscience.

Essais sur l’unité de l’esprit et de la matière.
Par Rupert Spira

Rupert Spira

Rupert Spira aborde tous les aspects de la compréhension non-duelle et bouscule le paradigme matérialiste de la société actuelle.

Notre culture mondiale est fondée sur l’hypothèse selon laquelle la réalité est constituée de deux éléments essentiels : le mental et la matière. Dans cette dualité, la matière est considérée comme l’élément premier, donnant lieu au paradigme matérialiste en vigueur selon lequel le mental ou la conscience – l’élément connaissant du mental – provient de la matière.

Comment la conscience découle-t-elle soi-disant de la matière – question connue sous l'expression "le difficile problème de la conscience" – demeure un mystère et c’est, en effet, une question des plus épineuses dans la science et la philosophie actuelles. Curieusement, le fait qu’il n'existe aucune preuve de ce phénomène n’est pas jugé suffisamment significatif pour éloigner la plupart des scientifiques et des philosophes de leur conviction selon laquelle la conscience constitue un dérivé de la matière, bien que de plus en plus nombreux sont ceux qui commencent à la remettre en question. La plupart d’entre eux continuent de croire qu'avec les avancées de la neurologie, les corrélats neuronaux de la conscience et les moyens qui lui permettent de procéder du cerveau seront tôt ou tard découverts et cette croyance est renforcée par les médias dominants. (…)

Pour beaucoup de gens, le débat portant sur la réalité ultime de l’univers constitue un débat théorique bien loin des préoccupations et des exigences de la vie quotidienne. Somme toute, quelle qu'elle soit, la réalité est ce qu'elle est, indépendamment de nos modèles. Néanmoins, j'espère que La Nature de la Conscience montrera clairement que le paradigme matérialiste est une philosophie du désespoir et du conflit et, à ce titre, la cause profonde du malheur éprouvé par les individus, ainsi que des hostilités entre communautés et nations.

Loin d'être abstraites et philosophiques, ses implications touchent directement et intimement chacun de nous car tout ce que nous pensons, ressentons ou accomplissons est profondément et, en grande partie, subliminalement influencé par ce paradigme en vigueur dans lequel nous avons grandi et vivons aujourd'hui.(…)

Le modèle de "la conscience seule" n'est pas nouveau. Tous les êtres humains sont, en profondeur, essentiellement identiques. Il doit donc exister une connaissance fondamentale de nous-mêmes qui transcende les conditionnements locaux et temporels transmis par notre culture et que nous partageons donc avec toute l'humanité, quelles que soient nos convictions politiques, religieuses ou idéologiques. Aldous Huxley appelle cela "la philosophie pérenne", c'est-à-dire la philosophie qui, en tous temps, en tous lieux, en toutes circonstances et pour tout le monde, demeure inaltérable. (…)


L'expérience constitue tout ce que l'on connaît ou pourrait jamais connaître. Nous avons beau nous démener avec les implications de cette affirmation, nous ne pouvons légitimement la nier. Etant la seule chose qui puisse être connue, l'expérience elle-même doit être le critère de la réalité. Si nous ne prenons pas l'expérience pour critère de la réalité, la croyance sera la seule alternative. Expérience et croyance — ou "la voie de la vérité et la voie de l'opinion", comme le disait Parménide au 5ème siècle avant JC — sont les deux seules possibilités.

On ne connaît que l'expérience, et tout ce que l'on connaît de l'expérience relève du mental. Par le mot "mental", dans ce contexte, je n'entends pas uniquement les pensées et les images, comme c'est le cas dans le langage courant; je veux dire toute expérience. Ceci englobe à la fois ce que l'on appelle communément notre expérience intérieure, c'est-à-dire les pensées, les images, les sentiments et les sensations, et notre expérience extérieure de la réalité ordinaire, à savoir le monde que nous connaissons à travers les cinq sens de la perception. Le mental inclut donc penser, imaginer, se souvenir, ressentir, sentir, voir, entendre, toucher, goûter et humer.

Si l'expérience représente tout ce que nous pourrions jamais connaître et que toute expérience est connue sous la forme du mental, il est alors nécessaire, pour connaître la nature ou la réalité ultime de toute chose connue, de connaître au préalable la nature du mental. Ainsi, le premier impératif de tout mental qui souhaite connaître la nature de la réalité doit être d'examiner et de connaître sa propre réalité.

Que le mental perçoive un monde à l'extérieur de lui, selon le paradigme matérialiste en vigueur ou qu'il projette le monde à l'intérieur de lui, selon l'approche de la "conscience-seule" suggérée dans ce livre, tout ce que l'on connaît ou dont on fait l'expérience est connu ou expérimenté par le truchement du mental. Autrement dit, le mental impose ses propres limites à tout ce qu'il voit ou connaît, aussi toute sa connaissance et toute son expérience apparaissent-elles comme un reflet de ses propres limitations. C'est la raison pour laquelle les scientifiques ne découvriront jamais la réalité de l'univers tant qu'ils ne seront pas décidés à explorer la nature de leur propre mental. (…)

En fait, tant que le mental ne connaît pas sa nature essentielle, il ne peut affirmer avec certitude que ce qu'il connaît ou ce dont il fait l'expérience représente l'absolue vérité et non un reflet de ses propres limitations. Ainsi, la connaissance de la nature ultime du mental permettant à toute connaissance et toute expérience d'être connues doit être le fondement de toute connaissance véritable. Donc, l'ultime question que peut poser le mental est : "Quelle est la nature du mental ?".

Le nom courant que se donne le mental est "Je". Ainsi, nous disons "je lis", "je pense", "je vois", ainsi de suite. C'est pourquoi la question "Quelle est la nature du mental ?" pourrait être reformulée comme suit : "Qui ou que suis-je ?". La réponse à cette question constitue la plus profonde connaissance à laquelle puisse parvenir le mental. C'est l'intelligence suprême.

La question "Quelle est la nature ultime du mental ?" ou "Qui ou que suis-je ?" est une question unique en son genre, en ce qu'elle constitue la seule question qui n'étudie pas le contenu objectif du mental mais au contraire sa nature essentielle. Et pour cette raison, la réponse apportée à cette question est tout aussi unique. La réponse à toute question relative au contenu objectif du mental apparaîtra toujours elle-même comme une connaissance objective. Par exemple, la question "Combien font deux plus deux" et la réponse "Quatre" représentent toutes deux des contenus objectifs du mental. Mais la nature du mental lui-même ne se montre jamais dans une connaissance objective, pas plus qu'elle ne peut être rigoureusement décrite dans les termes de cette connaissance objective, de même que l'écran n'apparaît jamais en tant qu'image dans un film.

La reconnaissance par le mental de sa nature essentielle relève d'un autre genre de connaissance, une connaissance qui fait l'objet de la quête ultime de toutes les grandes traditions religieuses, spirituelles et philosophiques et qui gît au cœur de toute personne aspirant à la paix, à l'épanouissement et à l'amour. (…)
"Je" est le nom commun désignant l'essence du mental qui connaît ou fait l'expérience. "Je" est le nom que l'on donne à cela qui connaît ou qui est conscient de toute connaissance et de toute expérience. Autrement dit, "Je" est le nom que se donne le mental pour qualifier son essence fondamentale et "connaissante" au cœur de toute sa connaissance et de toute son expérience fluctuantes. Je suis cela qui connaît ou qui fait l'expérience de toute expérience mais ne suis pas moi-même une expérience. Je suis conscient des pensées mais ne suis pas moi-même une pensée; je suis conscient des sentiments et des sensations mais ne suis pas moi-même un sentiment ou une sensation; je suis conscient des perceptions mais ne suis pas moi-même une perception. Quel que soit le contenu de l'expérience, je le connais ou en suis conscient. Ainsi, connaître ou être conscient est l'élément essentiel de toute connaissance, le facteur commun de toute expérience.

La nature de la conscience
Rupert Spira
Essais sur l'unité de l'esprit
Paru le 13 mai 2019 Essai (broché)
Un livre de 320 pages – ÉDTIONS ACCARIAS-L’ORIGINEL
https://www.originel-accarias.com