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Tantra, éveil et sexualité

Cédric Paroz et France Huc Dumas

Par Cédric Paroz et France Huc Dumas


Un mode d'emploi ? A l'occasion des stages de toutes sortes auxquels nous avons participé, mais aussi, et peut-être même surtout à travers nos expériences personnelles, nous découvrons jour après jour un outil merveilleux, dont chacun et chacune dispose potentiellement : la puissance incroyable de l'esprit humain.

Nous naissons tous avec un corps, corps muni d'un sexe, avec un cerveau, une conscience et un esprit. Ensuite, nous passons tous par un processus de sociabilisation qui place au plus profond de nous des automatismes, des valeurs et des programmes comportementaux. Tous ces acquis sont différents selon le lieu, l'époque et surtout selon le genre. Mais ils viennent tous de l'extérieur. Ils ont été élaborés au fil des siècles par des bien-pensants, sorcier du village, chef de la tribu, prêtres, gourous, philosophes etc. Et transmis par un entourage le plus souvent persuadé de bien faire. Mais nous sommes livrés ici-bas sans le mode d'emploi de notre Être, et l'éducation classique ne nous en donne qu'une pauvre version limitée tant que déformée.
Et surtout, cette « domestication » nous inculque qu'il faut écouter la morale extérieure en priorité et sacrifier notre être profond.

Genèse : Le plus bel exemple de cette affirmation est l'enfant qui se fait mal. Pour lui, dans l'instant présent, sa douleur est la chose la plus importante de son univers, elle est quasi sa seule réalité.
Et là, l'adulte bien formaté lui dit (sans même prendre conscience de l'énormité que cela représente), l'adulte lui dit « ce n'est rien ».
Par ces mots, l'adulte lui dit « ta réalité n'existe pas », elle est « rien », tout en lui faisant bien sentir que si il veut être aimé et considéré à nouveau, il doit se renier et faire comme si ce n'était effectivement rien.

L'humain sociabilisé se retrouve donc avec des en-vies, des pulsions voire des besoins profonds que la mort-râle lui assène de dénier pour ne se cantonner que dans un comportement stéréotypé.
Mais les en-vies sont là, elles gonflent, font pression dans la marmite à vapeur de la bonne conduite. De puissantes énergies de vie ne cessent d'émaner du plus profond de son Être. Il a beau chercher à les canaliser, elles l'appellent sans relâche à s'écouter, à vivre Sa vie plutôt que celle que la société a prévu pour lui.
A force de faire « ce qu'il faut » pour être aimé, l'humain se crée un masque, un personnage. Il obtient alors un peu d’attention, de tendresse voire d'amour, mais cela n'est pas satisfaisant. Il sent bien que c'est son masque qui est apprécié, et que lui, qui il est vraiment, n'est souvent même pas vu.

Renaître : Alors soit il se résigne en espérant obtenir ainsi le paradis à sa mort, ou alors il poursuit sa recherche, poussé par l'énergie de vie. La recherche de son Soi, la recherche de la véritable nature de son esprit, il cherche à se sentir bien dans son corps, dans sa tête ... En résumé, il cherche à Se connaître. Il cherche le mode d'emploi de son être. De nos jours, une expression bien à la mode est « il cherche l'éveil ».

Le Tantra, un chemin d'éveil : C'est précisément ce que vise le tantra (du moins les plus vieux textes comme le Vijnanabhaïrava Tantra , le « Tantra de la Connaissance Suprême » qui est l'un des textes shivaïtes des plus anciens.
Cet ouvrage de référence est présenté comme une conversation entre le dieu Bhairava et son épouse Bhairavi, Cette dernière étant assise en tailleur sur les jambes de Bhairava (ce qui a inspiré tant de dessins et statuettes dans le monde).
Ce texte esquisse 112 méthodes ou techniques de centrage (dharana). C'est-à dire d'éveil pour utiliser une terminologie moderne.

Parmi ces 112, seules 3 décrivent des pratiques évoquant vaguement la sexualité. Trois au milieu de variantes allant de la respiration, la concentration sur diverses choses ou parties du corps, le chant de mantra, l'imagination, la visualisation jusqu'à la contemplation de tous les sens.

Nous vivons une époque pleine d'agitation, de stimuli à tour de bras, de mouvements frénétiques quasi perpétuels. La méthode consistant à rester immobile devant un mur blanc à fixer un point sans cligner des yeux, dans ce contexte actuel ne fait plus beaucoup d'émules.


Pourquoi parler de sexe ? Voyons qu'à notre époque, la diabolisation de la sexualité, les différences d'éducation entre les hommes et les femmes, le peu d'occasion de la vivre pleinement, la quasi impossibilité de trouver un contexte dans lequel la laisser couler librement, tout cela fait que les stages tantriques impliquant la Kundalini sont de plus en plus prisés.
La recherche ultime est (parfois très inconsciemment) la maîtrise de son Être.
Alors oui, souvent les débutants espèrent y trouver une relation de couple harmonieuse, ou une guérison d'un trauma voire même de mettre fin à une histoire transgénérationnelle, mais ultimement toutes et tous cherchent la connaissance de leur esprit (dont le corps est une création), son mode d'emploi !
L'énergie de vie, ou énergie créative ou sexuelle, appelée aussi kundalini est très puissante.
Le déni, les efforts de chasteté, les vœux les plus sincères ne suffisent pas à la stopper. Elle est plus forte que tout, et elle est la dernière à subsister avant la mort du corps.

Si nous écoutons les morales, les possibilités de la laisser couler sont plutôt rares. Elle est plus ou moins bien tolérée dans le couple où elle est malheureusement utilisée comme un outil de chantage (ce qui est déjà préférable à l'époque ou l'utiliser autrement que pour procréer était proscrit). Dans des relations amant maîtresse, qui bien que décriée par les bien-pensants, reste largement tolérée (c'est même la teneur principale de la littérature agréée). Avec des professionel.le.s, mais ici la dimension émotionnelle reste d'une pauvreté affligeante.

Oser appeler un chat un chat : Le film « oh my god » présente une période historique pendant laquelle on traitait l'hystérie (mot dont utérus est à la racine) chez le médecin qui « massait » les parties intimes de la femme jusqu'à obtenir un « paroxysme » dont l'effet de détente permettait de retarder la survenue de la prochaine crise.
Aujourd'hui, cette pratique serait considérée comme non déontologique, les maris s'offusqueraient, et tout le monde comprend bien que le médecin de l'époque, sous couvert d’acte médical, ne faisant en réalité que de donner des orgasmes en masturbant ces femmes.
Pourtant les médecins de l'époque affirmaient avec sincérité « il ne s'agit pas de plaisir, mais d'actes médicaux ».
Ces faits historiques montrent bien que, lorsqu'elle est refoulée sous la plaque de plomb de la morale, cette énergie finit par causer des comportements ingérables. Que faire alors si ni le couple, ni les amant.e.s ni les professionnels ne sont efficaces ou accessibles ?
Trouver une autre voie pour laisser couler cette énergie d'une manière appropriée et qui soit compatible avec la morale de l'époque et le juge intérieur qu'elle a placé en chacun de nous ... ou alors devenir des morts vivants, des robots sans âme ... voire simplement mourir.
Toutes ces considérations nous amènent à la quasi certitude que si le tantra a tant de succès de nos jours, c'est parce que justement il offre cette voie (en tout cas partiellement).

Pour tenir compte de la diabolisation du sexe et des nombreux traumas en résultant, la grande majorité des stages rassurent sur le fait qu'il n'y a pas de sexe (on se masse intégralement, mais dans un esprit « spirituel », on soigne des traumas, on développe la kundalini, on fait circuler les énergies, on débloque les chakras ... « il ne s'agit pas de sexe, mais de pratiques spirituelles ».

Cadre et limites réelles : Dans son excellent ouvrage « Tantra, spiritualité et sexe », Osho (un des précurseurs du tantra en occident) explique que si il est fait en conscience, dans le but de mieux Se connaître, il n'y a pas d'acte qui ne soit pas tantrique. La différence entre ce qui est tantrique et ce qui ne l'est pas ne réside pas dans l'acte, mais dans le positionnement de l'esprit pendant l'acte. Mais bien sur (et Margot Anand, émule d'Osho, a été une des premières à le remarquer) : pour oser sortir du carcan de l'éducation, pour protéger nos éventuelles blessures, il est nécessaire de poser un cadre dans lequel chaque explorateur pourra se sentir en confiance, en sécurité.
La voie la plus facile est de (se) raconter qu'il n'y a pas de sexe durant un stage. Mais en même temps, c'est un peu hypocrite, parce que l'on va se masser intimement, que cela sera source de plaisir, que l'énergie que l'on va réveiller est bel et bien l'énergie sexuelle (la nommer kundalini n'est qu'une façade, un peu comme remplacer le mot « orgasme » par « paroxysme »).
Du coup, nous avons envie de lever cette hypocrisie.

Dans son bouquin « l'amant tantrique » Jacques Ferber dit quelque-chose comme « usuellement les gens qui font l'amour ne font en réalité que de se masturber avec un gode sophistiqué qu'ils appellent partenaire ». Et c'est à ce genre de pratique non satisfaisante que pensent la majorité des gens quand on parle de « sexe ».
Il s'agit de se libérer d'un trop plein d'énergie, avec ou sans la complicité du ou de la partenaire et sans vraiment chercher à se découvrir, à entrer dans la relation. Sans connexion, sans amour. Des actes qui durent en moyenne 4 ou 5 minutes.
Alors effectivement, dans ce sens là le sexe n'a rien de tantrique et est naturellement proscrit par le cadre de nos stages.

Pourtant, tout au fond de lui, chacun rêve d'une belle intimité, d'un échange de cœur à cœur, de se sentir vu, aimé, touché. Certes, certain.e.s n'ont pas su imaginer d'autre chemin que d'avoir du « sexe » pour s'approcher de cet état d'être ultime ... mais nous sommes persuadés que, en profondeur, c'est bien la recherche de la quintessence de l'énergie sexuelle qui les anime.

Oser être audacieux : Alors si c'est le chemin qui est suivi, si il est conscient et librement consenti par les partenaires, il est un chemin des plus merveilleux, et l'énergie sexuelle peut devenir un outil tantrique des plus efficaces (voir par exemple l'ouvrage de Margot Anand « la magie sexuelle dans le tantra « ).
Découvrir les bons côtés de l'énergie sexuelle (ses aspects magiques) est une délicieuse voie d'exploration personnelle et de réalisation de Soi !
C'est le chemin ou outil que nous nous réjouissons de développer avec ceux qui se sentent prêts dans des stages avancés, au travers d'activités toujours ludiques en vue d'apprendre à jouer avec ces énergies plutôt que d'en être le "jouet".

Cédric Paroz et France Huc Dumas

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