meditationfrance, méditation, tantra, connaissance de soi
Les archives de Meditationfrance

La méditation arrive dans les prisons !

prison

par Vincenzo Fatta

Le Dr Vincenzo Fatta a commencé à animé un séminaire de méditation et de thérapie holistique dans la prison de Pagliarelli en Italie. Il nous raconte son expérience.

Cela nous a pris presque 1 an avant que le projet (Méthodes de Relaxation et de Purification pour les prisons) soit approuvé par le conseil municipal de Palerme et par l'administration de la prison. Mais ça y est, on a commencé.le premier jour je me suis retrouvé dans une pièce de la prison (avec mon collègue), avec en face une audience de prisonniers qui ont été descendus de leur cellule pour découvrir ce mystérieux séminaire de méditation.

Dans ma vie, je me suis retrouvé dans toute sorte d'endroits pour animer des stages de méditation et de thérapie mais là, cette fois ci, la scène était vraiment irréelle ! Des gardiens sur le côté, une centaine de prisonniers dont certains font partie de la mafia et d'autres ont été arrêtés pour des crimes plus ou moins sérieux. Plusieurs d'entre eux avaient une drôle d'expression, impossible à scruter.

Je commence alors à percevoir autour de mon solaire plexus une douleur, un mélange de malaise et d'angoisse. Que vais-je pouvoir dire à ces gens ? Comment partager la méditation avec des personnes, qui du fait de restrictions extérieures, vivent bien en dessous de leur potentiel ?

Tous ces sentiments passent en moi pendant ces longues minutes de silence. Puis, je me lance avec ces paroles provocantes : «  Les méthodes dont je vais vous parler ne sont pas pour tout le monde.elles sont seulement pour ceux qui se sentent encore vivants et qui veulent utiliser le temps qu'ils passent en prison pour eux-mêmes.c'est seulement pour ceux qui veulent découvrir plus de liberté à l'intérieur d'eux-mêmes. »

Soudainement, l'énergie change dans la salle. l'atmosphère est plus vivante, les regards s'agitent... je perçois de la curiosité, de l'intérêt, du rejet, de l'exubérance et de l'indifférence.

Je commence à expliquer le contenu du séminaire puis je détaille un peu les techniques de méditation et en quoi elles peuvent nous libérer des tensions mentales, physiques et émotionnelles dont nous souffrons tous, qu'on soit ou pas en prison.

Je précise que les participants devront forcément avoir un certificat médical confirmant qu'ils n'ont aucun problème psychiatrique et aucune maladie contagieuse.

Lorsque à la fin de mon explication, je demande qui serait intéressé par un tel travail, je vois des dizaines de mains se lever et je comprends alors qu'on ne pourra pas prendre tout le monde. Je me sens mal à l'aise de fermer la porte à tant de gens et je laisse le sale travail aux éducateurs pour choisir ceux qui pourront participer à ce long séminaire.

Je reprend mon explication. Je parle de l'importance de se débarrasser des toxines qui sont accumulées dans notre organisme à chaque fois que nous sommes dans des situations de : colère, tristesse, frustrations. Je leur explique qu'il est possible de trouver « une liberté intérieure indépendante des situations externes.

Certains se rebellent : Quoi ? Ma famille est en dehors sans rien n'a mangé, et avec tous ces soucis comment vous voulez que je puisse trouver le calme intérieur ?

Malgré une certaine émotion intérieure, je trouve la force de répondre que « ce stage est seulement pour ceux qui veulent changer, ceux qui ne veulent pas s'enfoncer dans le pessimisme, la frustration et la paresse. »  

Je me sens de plus en plus protégé par une source inconnue, ce n'est pas les gardiens de prison qui me rassurent, c'est autre chose.même si c'est sûr que sans les gardiens, certains prisonniers m'auraient dit d'aller me faire voir. !

Désormais le message est clair : « Nous sommes tous en prison : la prison des peurs, des conditionnements et des obsessions. Paradoxalement, en fait, vous êtes dans une situation qui est plus claire que celle des autres. Les autres sont dehors. Et du coup, ils se croient libres. ».

Même le prisonnier qui aimait argumenter avec moi depuis le début de la présentation est bouche bée. Tout le monde est devenu très attentif. Plus personne ne cherche à se battre avec mes arguments. Au contraire, ils semblent très respectueux, comme des jeunes écoliers curieux, concentrés, pour essayer de comprendre les bénéfices de la pratique de la méditation.

J'ai terminé en leur disant que nous souhaitions commencer rapidement et que nous attendons juste que la salle de méditation soit préparée et que tous les prisonniers intéressés par le séminaire aient passé une visite médicale. Nous les quittons, ils nous disent au revoir avec beaucoup de chaleur humaine et d'excitation.

Au moment où j'écris cet article, nous en sommes à un peu plus de la moitié du séminaire. On a une grosse participation, 70 % des prisonniers nous ont rejoint. Certains prisonniers ont quitté le séminaire soit parce qu'ils ont été transféré, soit parce qu'ils ont été libéré mais de nouvelles personnes veulent déjà venir méditer avec nous. Nous avons réussi à imposer notre manière de travailler après avoir connu quelques difficultés des gardiens qui voulaient continuellement contrôler ce qui se passait et ils étaient très intrusifs.

Maintenant, nous sommes automnes et trois fois par semaine, deux heures durant, le message n'est ni le contrôle ni la répression mais au contraire le lâcher prise, la relaxation et l'expérimentation de l'être. 

Les gardiens (qui regardent par des trous) m'ont confessé que dès fois, ils auraient bien aimé venir avec nous méditer ou « devenir fous » comme on se donne dès fois la permission dans les séances de thérapie méditative ou de la méditation dynamique .

C'est incroyable, je trouve, que dans un lieu si particulier, où pour survivre, il faut se barricader psychologiquement, certains prisonniers arrivent quand même dans les moments de solitude de la méditation à ouvrir complètement leur cour.et ils retrouvent alors la confiance en eux-mêmes et dans une nouvelle vision de la vie.
Dans ces séances, un espace énergétique a été crée qui n'appartient pas à la prison mais qui est une sorte d'oasis où l'on peut se sentir accepté et où l'on est pas jugé.

Aujourd'hui, nous sommes arrivés à une étape où cela nous arrive même de chanter des chansons napolitaines et de se raconter des blagues. Une certaine amitié est apparue qui rend le séminaire de méditation beaucoup plus sympa et chaleureux.
Je ne sais pas jusqu'à où le séminaire va pouvoir aider la qualité de vie des prisonniers en prison. Les prisonniers veulent déjà continuer au delà des trois mois ; nous, l'équipe, on est aussi disponible, maintenant, cela va dépendre des institutions, voudront-elles investir dans ces méthodes ?

(Traduction réalisée par MF)